Si vous ne savez pas d’où vous venez, vous ne savez pas où vous allez.
Fêter cette 25e édition ne se fait pas sans trembler lorsque nous regardons l’horizon.
Aujourd’hui, dans certaines parties du monde, il existe des mots interdits. Cette vague s’étend comme une maladie qui avait pourtant trouvé quelques antidotes dans la démocratie. Ces derniers temps la maladie se répand et les mots interdits disparaissent – c’est comme une hémorragie.
Alors, quel manifeste pour actoral 2025 ? Pour nous, l’art restera un espace de liberté, restera un espace d’éveil, restera un espace où l’on tente sans cesse d’orienter nos regards vers un monde commun. Une culture libre signifie qu’elle n’est pas guidée par les institutions politiques mais qu’elle est au service du public, des artistes, qu’elle nous réunit au-delà du divertissement. Elle ne craint pas les nouveaux chemins, elle ne craint pas le risque, elle ne craint pas de donner confiance aux artistes ni d’aiguiser la curiosité du public. Nous plaidons pour un monde où les idées, les différences, les contractions, les espoirs peuvent se partager en toute quiétude.
Ouvrons ce livre des mots interdits et citons en quelques-uns avant que d’autres tentent de les effacer :
inclusion, justice, changement climatique, discrimination, LGBTQIA+, queer, égalité d'accès aux soins, santé mentale, différences culturelles, travailleur et travailleuse du sexe, équité communautaire, équitable, handicap, diversité des origines, égalité des chances, qualité environnementale, exclusion, genre, idéologie de genre, violence basée sur le genre, migrant·es, militant·es, inclusif, communauté autochtone, marginalisé·es, multiculturel, pronom non-genré, non binaire, oppression, soins centrés sur les personnes, pollution, promotion de la diversité, antiracisme, iel, trans, transgenre, transsexuel, trauma, traumatisme, personnes défavorisé·es, populations vulnérables, femmes et sous-représenté·es…
Et nous pourrions continuer ainsi la liste de ces mots que certain·es veulent bannir, de ces mots qualifiés de suspects. Nous nous y opposons et plaçons ici un désir de paix contre le mot « sécurité », aujourd’hui vidé de son sens et qui justifie tous les actes répressifs. La clairvoyance des arts, des mots, a la vie dure.
Cette 25e édition du Festival actoral, nous l’avons préparée pour vous offrir le plus bel écho de la diversité des écritures d’aujourd’hui. Joies, plaisirs, curiosités, sérieux, amusements, émotions seront, nous l’espérons, au rendez-vous pour ce début d’automne à Marseille, avec vous.
Plus de 70 projets artistiques – littérature, cinéma, danse, théâtre, performance, musique, cabaret, art visuel, rencontres – et plus de 100 artistes, technicien·nes et bénévoles vous accompagneront au cœur de la création contemporaine.
Je reprendrai ici les mots de Némo Flouret, jeune chorégraphe qui présentera Derniers feux sur la place d’Armes du Mucem : « Ce qui nous réunit est le désir de nouvelles choses ou de faire autrement ce que nous pratiquons déjà. Il s’agit de chercher des imaginaires autres, de nous écouter différemment. Passer au travers de l’inconnu, ensemble pour se rencontrer… ».
actoral ouvrira les mémoires des corps oubliés, des déshérité·es d’avant et d’aujourd’hui, des laissé·es pour compte et de tout ce qui anime nos regards sans que nous en ayons une pleine conscience. Nous écouterons des œuvres d’artistes qui feront résonner ce que nous portons au fond de nous. Au travers de récits, de gestes, de paroles, d’images, de textes et de sons, nous écouterons l’humain au cœur de toute chose.
Et n’oublions pas que ce festival n’existerait pas sans les théâtres et les lieux qui l’accueillent, sans nos partenaires, sans la bienveillance des institutions, sans les ami·es, sans l’engagement des artistes. Sans vous. Merci.
Hubert Colas, l'équipe et le conseil d'administration d'actoral